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Mercredi 09 février 2022
Pour en finir avec les pesticides
Retrouvez ma contribution dans le livre "Pour en finir avec les pesticides" de Claude AUBERT et François VEILLERETTE :
Trois convictions m'animent profondément dans le combat au long cours pour nous affranchir de la dépendance aux pesticides. La première est que si la nature produit des “pestes” qu'il est légitime de combattre pour vivre, il est absurde que cela se retourne contre nous en détruisant les conditions mêmes de la vie. La seconde est que toutes les innovations technologiques et génétiques ne seront pas en l'absence de principes agronomiques fondamentaux et de régulations économiques. À commencer par celui du partage de la terre : l'équilibre écologique passe par la relève d'une nouvelle génération paysanne et non par un accaparement destructeur de valeurs. Enfin, et c'est capital pour la sécurité alimentaire du monde, l'agroécologie peut nourrir les Européens et échanger de façon équitable autour de la Méditerranée. Nommé président du comité de surveillance d'Écophyto en 2013, j'ai pris acte de l'échec de ce plan lancé par le Grenelle de l'environnement en 2008. Non seulement la trajectoire de -50 % de pesticides sur la décennie n'est pas tenue, mais une légère augmentation est observée sur la période… Au moment où une étude de l'Inserm révélait les effets cocktails des pesticides sur la santé humaine, le rapport de mission que j'ai rendu en 2014 à la demande du Premier ministre dessinait la voie d'une véritable sortie de la dépendance à la phytopharmacie : 68 recommandations élaborées avec les organisations agricoles, les ONG environnementales et les instituts scientifiques. Je ne cesse depuis lors de défendre leur mise en oeuvre. Si elles sont restées en grande partie lettre morte, ces propositions demeurent terriblement d'actualité. Je suis fier d'avoir contribué à quelques avancées significatives. Parmi celles-ci, la phyto-pharmacovigilance post-AMM qui permet l'étude et, le cas échéant, le retrait de produits dont les effets indésirables se révèlent in situ, mais aussi la définition et l'accélération des solutions de biocontrôle ou encore la création du fonds d'indemnisation des “phyto-victimes”. Mais tout indique que nous sommes loin du compte ! Les Certificats d'Économie de Produits Phytopharmaceutiques (CEPP) – système de bonus-malus – étaient l'un des leviers les plus prometteurs du plan, car faisant appel à l'inventivité propre aux filières et aux territoires. Hélas, adoptée en 2017, cette seule mesure contraignante sera abandonnée en 2019 par décret, malgré mon recours au Conseil d'État. Plus globalement et alors même que les États généraux de l'alimentation ont confirmé l'esprit et souvent la lettre de nos intuitions, aucune des mesures systémiques n'a été mise en oeuvre, le plan Écophyto n'est plus porté politiquement, les instances de concertation sont dévitalisées et le plan stratégique national de la PAC est dominé par l'immobilisme. Le “plan B comme betterave” que j'ai proposé en alternative à la réintroduction de néonicotinoïdes illustre l'indispensable combinaison des leviers : nouvelle taxonomie des signes de qualité, régulation des marchés et bouquet d'innovations – de la chimie végétale jusqu'aux mosaïques paysagères. Car il n'y a pas de fatalité ! La France a des atouts pour devenir le leader européen de l'agroécologie. Défendre les clauses miroirs dans le commerce international, oser une grande loi foncière, tenir la promesse d'une puissante recherche agronomique et prendre appui sur la révolution culturelle au sein de la société civile, celle des citoyens consommateurs comme producteurs. “Une seule santé” pour les sols et pour les Hommes est un récit de réconciliation.
Trois convictions m'animent profondément dans le combat au long cours pour nous affranchir de la dépendance aux pesticides. La première est que si la nature produit des “pestes” qu'il est légitime de combattre pour vivre, il est absurde que cela se retourne contre nous en détruisant les conditions mêmes de la vie. La seconde est que toutes les innovations technologiques et génétiques ne seront pas en l'absence de principes agronomiques fondamentaux et de régulations économiques. À commencer par celui du partage de la terre : l'équilibre écologique passe par la relève d'une nouvelle génération paysanne et non par un accaparement destructeur de valeurs. Enfin, et c'est capital pour la sécurité alimentaire du monde, l'agroécologie peut nourrir les Européens et échanger de façon équitable autour de la Méditerranée. Nommé président du comité de surveillance d'Écophyto en 2013, j'ai pris acte de l'échec de ce plan lancé par le Grenelle de l'environnement en 2008. Non seulement la trajectoire de -50 % de pesticides sur la décennie n'est pas tenue, mais une légère augmentation est observée sur la période… Au moment où une étude de l'Inserm révélait les effets cocktails des pesticides sur la santé humaine, le rapport de mission que j'ai rendu en 2014 à la demande du Premier ministre dessinait la voie d'une véritable sortie de la dépendance à la phytopharmacie : 68 recommandations élaborées avec les organisations agricoles, les ONG environnementales et les instituts scientifiques. Je ne cesse depuis lors de défendre leur mise en oeuvre. Si elles sont restées en grande partie lettre morte, ces propositions demeurent terriblement d'actualité. Je suis fier d'avoir contribué à quelques avancées significatives. Parmi celles-ci, la phyto-pharmacovigilance post-AMM qui permet l'étude et, le cas échéant, le retrait de produits dont les effets indésirables se révèlent in situ, mais aussi la définition et l'accélération des solutions de biocontrôle ou encore la création du fonds d'indemnisation des “phyto-victimes”. Mais tout indique que nous sommes loin du compte ! Les Certificats d'Économie de Produits Phytopharmaceutiques (CEPP) – système de bonus-malus – étaient l'un des leviers les plus prometteurs du plan, car faisant appel à l'inventivité propre aux filières et aux territoires. Hélas, adoptée en 2017, cette seule mesure contraignante sera abandonnée en 2019 par décret, malgré mon recours au Conseil d'État. Plus globalement et alors même que les États généraux de l'alimentation ont confirmé l'esprit et souvent la lettre de nos intuitions, aucune des mesures systémiques n'a été mise en oeuvre, le plan Écophyto n'est plus porté politiquement, les instances de concertation sont dévitalisées et le plan stratégique national de la PAC est dominé par l'immobilisme. Le “plan B comme betterave” que j'ai proposé en alternative à la réintroduction de néonicotinoïdes illustre l'indispensable combinaison des leviers : nouvelle taxonomie des signes de qualité, régulation des marchés et bouquet d'innovations – de la chimie végétale jusqu'aux mosaïques paysagères. Car il n'y a pas de fatalité ! La France a des atouts pour devenir le leader européen de l'agroécologie. Défendre les clauses miroirs dans le commerce international, oser une grande loi foncière, tenir la promesse d'une puissante recherche agronomique et prendre appui sur la révolution culturelle au sein de la société civile, celle des citoyens consommateurs comme producteurs. “Une seule santé” pour les sols et pour les Hommes est un récit de réconciliation.