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Jeudi 8 août
Libération publie la Tribune sur la ruralité
Libération a publié dans l'édition de ce jour la Tribune sur la ruralité rédigée par Dominique Potier et sa collègue Carole Delga.
Pour une nouvelle ruralité
Le texte publié :
" Pour une nouvelle ruralité
Par DOMINIQUE POTIER, Député PS de Meurthe et Moselle
et CAROLE DELGA Députée PS de Haute Garonne, secrétaire nationale à l’égalité des territoires et au logement
Aujourd’hui coexistent deux visions du monde rural, aussi stériles l’une que l’autre pour l’avenir.
Pour les uns, l’espace rural doit rompre avec la croissance démographique de ces dernières décennies. Cette croissance est un leurre car elle est alimentée aux trois quarts par l’étalement urbain, de «nouveaux habitants» qui font un pas de côté pour un nouveau modede vie ou à cause du coût de l’habitat dans les centres ville où ils travaillent.
Pour les autres, la poursuite de la croissance démographique est le mouvement «naturel» de l’espace rural, la marque de sa vitalité.Arrêter ce mouvement, c’est ouvrir le spectre de la désertification.
Ces deux discours puisent des arguments dans des réalités trop contrastées.
Quoi de commun entre ces lotissements champignons qui poussent dans «l’entre deux»des champs et des villes et le semis des villages enracinés loin des mobilités périurbaines? Quoi de commun entre les espaces ruraux de régions en croissance –arrière-pays de l’arc atlantique ou Piémont lyonnais– et ceux des diagonales arides –Cantal ou Ardennes postindustrielles?
Les deux postures présentent des écueils. Ecueil de la poursuite d’un urbanisme de la demande qui artificialise les sols, masque le coût des réseaux et de la mobilité et capte de nouveaux résidents sans liens solides avec leur environnement naturel et humain. Ecueil aussi d’une société qui, fascinée par le «fait urbain», semble oublier que lemaintien des fonctions vitales dumonde rural ne résiste pas au retrait de ses forces vives. La vérité, c’est qu’une troisième voie est possible! Elle concilie l’urgente obligation de préserver les biens communs –ressources naturelles et moyens publics– et celle de renouveler les générations rurales.
Trois actes permettent cette renaissance.
Premier acte : rééquilibrer la croissance démographique. La planification de l’habitat doit se faire au bénéfice des espaces ruraux les plus éloignés et des coeurs de ville. Nous devons rompre avec une vision dépassée du développement sur l’archétype «centre-périphérie» et choisir le maillage polycentrique comme modèle.
Deuxième acte: partager les moyens publics. Le réseau des services à la population devra traduire un nouvel équilibre entre lamaîtrise du coût public et l’égalité des chances pour l’ensemble des habitants. Les outils de péréquation et de développement «traditionnels» doivent être modernisés.D’autres doivent naître pour rendre possible la rénovation rurale: maîtrise publique du foncier, conventions cadres avec les bailleurs sociaux pour des logements «mixtes», enfin une aide à la pierre équivalente à celle des politiques urbaines doit permettre des opérations de rénovation rurale.
Troisième acte: l’innovation publique dans la relation ville-campagne. Nous devons sortir des prés carrés dans la décision publique et d’une certaine désinvolture quant à l’argent public.
Les citoyens attendent des politiques qui intègrent les nouvelles manières d’habiter à la fois l’espace rural et urbain. Vivre et investir autrement est une chance pour le pouvoir d’achat, le bilan carbone mais aussi la qualité de vie!
A ces trois actes, nous devons ajouter une conviction : il n’y aura pas de croissance qualitative pour nos espaces sans une nouvelle génération d’entrepreneurs ruraux.
Les sources de valeurs ajoutées inexploitées sont immenses : marché de produits agroalimentaires de qualité; production d’énergie renouvelable;
tourisme et loisirs à taille humaine; réseaux de petites entreprises créatrices de biens et de services…
La loi d’avenir agricole vise, pour ce qui la concerne, à redonner sa chance à l’emploi en milieu rural. Un changement de paradigme s’impose. L’image de l’arbre peutnous aider.Vu du ciel, sa représentation met au même plan racines et feuillages; elle illustre le maillage géographique français dans sa diversité. Le tronc, symbole de la ville par sa densité et sa fonction structurante. Les espaces ruraux en sont les indispensables racines : eau, air, énergie, alimentation. Les branches illustrent le maillage de l’urbanité rurale.
Un territoire d’avenir est comme un arbre dont le tronc et le branchage sont équilibrés. Un arbre où la sève circule bien, des racines jusqu’aux feuilles.
Alors, comme un seul arbre, sommes-nous tous habitants d’espaces dépendants les uns des autres? C’est possible, si, unis dans la diversité, nous sommes acteurs d’un système multipolaire, s’il s’agit de rompre avec la limite du cadastre rural comme avec une certaine folie des grandeurs urbano-centriques, si des conditions de vie dignes et équitables sont recherchées pour tous ceux qui sont exclus, à la ville comme à la campagne…
L’équilibre entre vie moderne et écosystème durable passe par un nouveau pacte d’aménagement du territoire et doit contribuer à réduire les fractures territoriales qui, ajoutées aux inégalités sociales, fragilisent la citoyenneté et par là même la promesse républicaine".
Pour une nouvelle ruralité
Le texte publié :
" Pour une nouvelle ruralité
Par DOMINIQUE POTIER, Député PS de Meurthe et Moselle
et CAROLE DELGA Députée PS de Haute Garonne, secrétaire nationale à l’égalité des territoires et au logement
Aujourd’hui coexistent deux visions du monde rural, aussi stériles l’une que l’autre pour l’avenir.
Pour les uns, l’espace rural doit rompre avec la croissance démographique de ces dernières décennies. Cette croissance est un leurre car elle est alimentée aux trois quarts par l’étalement urbain, de «nouveaux habitants» qui font un pas de côté pour un nouveau modede vie ou à cause du coût de l’habitat dans les centres ville où ils travaillent.
Pour les autres, la poursuite de la croissance démographique est le mouvement «naturel» de l’espace rural, la marque de sa vitalité.Arrêter ce mouvement, c’est ouvrir le spectre de la désertification.
Ces deux discours puisent des arguments dans des réalités trop contrastées.
Quoi de commun entre ces lotissements champignons qui poussent dans «l’entre deux»des champs et des villes et le semis des villages enracinés loin des mobilités périurbaines? Quoi de commun entre les espaces ruraux de régions en croissance –arrière-pays de l’arc atlantique ou Piémont lyonnais– et ceux des diagonales arides –Cantal ou Ardennes postindustrielles?
Les deux postures présentent des écueils. Ecueil de la poursuite d’un urbanisme de la demande qui artificialise les sols, masque le coût des réseaux et de la mobilité et capte de nouveaux résidents sans liens solides avec leur environnement naturel et humain. Ecueil aussi d’une société qui, fascinée par le «fait urbain», semble oublier que lemaintien des fonctions vitales dumonde rural ne résiste pas au retrait de ses forces vives. La vérité, c’est qu’une troisième voie est possible! Elle concilie l’urgente obligation de préserver les biens communs –ressources naturelles et moyens publics– et celle de renouveler les générations rurales.
Trois actes permettent cette renaissance.
Premier acte : rééquilibrer la croissance démographique. La planification de l’habitat doit se faire au bénéfice des espaces ruraux les plus éloignés et des coeurs de ville. Nous devons rompre avec une vision dépassée du développement sur l’archétype «centre-périphérie» et choisir le maillage polycentrique comme modèle.
Deuxième acte: partager les moyens publics. Le réseau des services à la population devra traduire un nouvel équilibre entre lamaîtrise du coût public et l’égalité des chances pour l’ensemble des habitants. Les outils de péréquation et de développement «traditionnels» doivent être modernisés.D’autres doivent naître pour rendre possible la rénovation rurale: maîtrise publique du foncier, conventions cadres avec les bailleurs sociaux pour des logements «mixtes», enfin une aide à la pierre équivalente à celle des politiques urbaines doit permettre des opérations de rénovation rurale.
Troisième acte: l’innovation publique dans la relation ville-campagne. Nous devons sortir des prés carrés dans la décision publique et d’une certaine désinvolture quant à l’argent public.
Les citoyens attendent des politiques qui intègrent les nouvelles manières d’habiter à la fois l’espace rural et urbain. Vivre et investir autrement est une chance pour le pouvoir d’achat, le bilan carbone mais aussi la qualité de vie!
A ces trois actes, nous devons ajouter une conviction : il n’y aura pas de croissance qualitative pour nos espaces sans une nouvelle génération d’entrepreneurs ruraux.
Les sources de valeurs ajoutées inexploitées sont immenses : marché de produits agroalimentaires de qualité; production d’énergie renouvelable;
tourisme et loisirs à taille humaine; réseaux de petites entreprises créatrices de biens et de services…
La loi d’avenir agricole vise, pour ce qui la concerne, à redonner sa chance à l’emploi en milieu rural. Un changement de paradigme s’impose. L’image de l’arbre peutnous aider.Vu du ciel, sa représentation met au même plan racines et feuillages; elle illustre le maillage géographique français dans sa diversité. Le tronc, symbole de la ville par sa densité et sa fonction structurante. Les espaces ruraux en sont les indispensables racines : eau, air, énergie, alimentation. Les branches illustrent le maillage de l’urbanité rurale.
Un territoire d’avenir est comme un arbre dont le tronc et le branchage sont équilibrés. Un arbre où la sève circule bien, des racines jusqu’aux feuilles.
Alors, comme un seul arbre, sommes-nous tous habitants d’espaces dépendants les uns des autres? C’est possible, si, unis dans la diversité, nous sommes acteurs d’un système multipolaire, s’il s’agit de rompre avec la limite du cadastre rural comme avec une certaine folie des grandeurs urbano-centriques, si des conditions de vie dignes et équitables sont recherchées pour tous ceux qui sont exclus, à la ville comme à la campagne…
L’équilibre entre vie moderne et écosystème durable passe par un nouveau pacte d’aménagement du territoire et doit contribuer à réduire les fractures territoriales qui, ajoutées aux inégalités sociales, fragilisent la citoyenneté et par là même la promesse républicaine".